• Le deuil de la mélancolie - Michel Onfray - Michel Onfray a écrit le contenu de ce livre  "à chaud" avec son iPhone, sur son lit d'hôpital. Il a fait le choix de ne rien retoucher de ce qu'il a inscrit, pensé à ces instants. Il relate son AVC et comment plusieurs médecins et spécialistes sont passés "à côté", la vie sauve qu'il doit à la notoriété qui aide à passer des examens décisifs dans la journée alors que pour tout un chacun il faut se résoudre à attendre plusieurs jours. On ne les a pas toujours.

    Dans un premier temps, je l'ai trouvé vraiment sévère avec le corps médical (nous connaissons tous la situation de l'hôpital public. Qui n'a pas dans sa famille, ses connaissances, un infirmier, une anesthésiste, ou tout autre spécialiste qui nous en raconte "de bonnes", souvent à la limite de l'invraisemblable ?). On réclame l'indulgence. Mais quand cela nous concerne, ce n'est pas tout aussi simple. Alors, réflexion faite, je comprends sa colère : ce n'est pas tant l'erreur de diagnostic qui le fait bondir, mais le fait que les médecins concernés n'aient pas accepté s'être trompés. Beaucoup de vanité dans les réponses qui lui ont été faites. Je vous laisse juge.

    Cet AVC il en connait la cause. La mort de sa compagne Marie-Claude. Ses réflexions m'ont beaucoup touchée. Il n'y a plus de philosophe, plus d'homme de lettres, prompt à analyser, décortiquer pour penser et agir. Il n'y a qu'un homme qui souffre, qui ploie sous le chagrin, l'incompréhension et le déni...

    Ce qu'il dit, toute personne confrontée à la maladie et la mort l'a vécu ; je n'aurais pas pensé qu'il soit, lui aussi, confronté à l'éloignement des proches et amis. J'imaginais bêtement que la notoriété avait cet avantage de se sentir entouré. Oui, mais que pour le bon. Pas pour tout le reste...
    Sommes-nous si peu à avoir le courage de tenir une dernière fois la main d'un ami qui s'en va, d'accompagner celui ou celle qui reste seul, écrasé par le désespoir et la tristesse ? Pourquoi si peu pleurent avec nous ? Une constante de la nature humaine, sans doute...

    Le deuil de la mélancolie, c'est de savoir vivre après. Mais pas que.

    Vivre n'est pas prendre soin de soi, ce qui est une affaire d'infirmerie ou d'hospice et relève d'une morale de dispensaire : vivre c'est prendre soin de ceux qu'on aime...

    Vivre en étant à la hauteur de ce qu'elle fut : un modèle de rectitude, de droiture, de justesse et de justice, de générosité, de bienveillance et de douceur, de force discrète et de courage modeste. J'avais eu mon père comme premier modèle d'héroïsme simple et réservé ; j'ai eu Marie-Claude comme second modèle pendant presque 37 ans. C'est déjà une grande chance, une immense chance. Merci pour ce cadeau. Je te suivrai un temps, mais l'éternité du néant nous réunira.

    ¤ ¤ ¤
    4ième de couv :

    J'ai subi un infarctus quand je n'avais pas encore trente ans, un AVC quelque temps plus tard, puis un deuxième en janvier 2018. Nietzsche a raison de dire que toute pensée est la confession d'un corps, son autobiographie. Que me dit le mien avec ce foudroiement qui porte avec lui un peu de ma mort ?
    La disparition de ma compagne cinq ans en amont de ce récent creusement dans mon cerveau, qui emporte avec lui un quart de mon champ visuel, transforme mon corps en un lieu de deuil. " Faire son deuil " est une expression stupide, car c'est le deuil qui nous fait.
    Comment le deuil nous fait-il ? En travaillant un corps pour lequel il s'agit de tenir ou de mourir. Un lustre de mélancolie ou de chagrin porte avec lui ses fleurs du mal.
    Ce texte est la description du deuil qui me constitue. Faute d'avoir réussi son coup, la mort devra attendre. Combien de temps ? Dieu seul (qui n'existe pas) sait... Pour l'heure, la vie gagne. Ce livre est un manifeste vitaliste.

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  • Quand on est scénariste, on peut éprouver une certaine frustration parce qu’on a imaginé quelque chose qui est réalisé et qui n’est pas ce qu’on avait rêvé ; mais là il y a le film, et le scénario n’existe plus. Le scénario est un objet transitoire qui n’est pas destiné à être lu en dehors des gens qui font le film. Cela peut créer un regret, une amertume, une frustration chez le scénariste. En revanche, quand on écrit des livres qui sont adaptés au cinéma, je dirais que, même si le film est raté, le livre existe toujours. Ça n’entame pas du tout ses qualités ou ses défauts.

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  • C'est quelque chose qui me mine un peu... - Emmanuel Carrère -

    Depuis la fin du Royaume, je suis en panne comme écrivain : je savais que cela allait arriver. Je me disais aussi que si j'étais prévenu un peu de cela, ça se passerait, ma foi, gentiment, ou pas désagréablement. Mais ce n'est pas vrai, c'est quelque chose qui me mine un peu, même si j'ai d'autres occupations, essentiellement d'écrire des scénarios et de faire des reportages, mais voilà, je le savais. Je ne sais pas comment je me suis engagé dans cette phase...

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  • Puisque rien ne dure - Lareunce Tardieu - Certains êtres, à mesure que le temps passe, deviennent de plus en plus libres : ils se redressent au lieu de s’affaisser. Il émane d’eux une énergie étonnante. Ils sont lumière pour qui les rencontre. J’aimerais savoir ce qu’ils ont fait des ombres de leur passé. De leurs regrets, de leurs déchirures. Comment ils s’en sont arrangés.
    Parce qu’on n’oublie rien, je le sais ce soir. On n’oublie rien. Quand bien même on s’est efforcé du contraire : le passé vit en nous. Masse informe tapie au plus profond de soi, qu’on pourrait croire endormie mais qui veille… Alors, eux, ces êtres de lumière : comment font-ils ?

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  • Utopies réalistes  - Rutger Bregman - - Tu y crois à ça ?

    - A quoi ?

    - Bah, à ton bouquin-là ! Tu crois que c'est possible : le revenu universel, l'indice de bien être économique durable, le partage du travail... ?

    - C'est réalisable et cela a été réalisé dans certains pays à titre d'expérimentation ou de façon durable. Les résultats sont sans appel : non seulement la situation personnelle des gens s'en est trouvée grandement améliorée mais cela a été créateur de richesses pour la société entière. Et pour un coût moindre que toutes les politiques sociales existantes.

    - J'ai pas tout lu, mais j'ai parcouru, ça a l'air de se tenir. Mais il reste un problème essentiel dans cette idée humaniste : Si on donne aux pauvres le moyen de subvenir à leurs besoins élémentaires, qui ira faire les boulots pourris auxquels la précarité les contraint ? Tu crois qu'ils iront tous demain ramasser nos poubelles et nos merdes ? Tu crois qu'ils iront pointés à l'usine pour souder, découper, assembler toujours les mêmes choses dans le bruit et des cadences infernales ? Et je ne te parle même pas de ce qui se passe ailleurs, tous ces pays qui fabriquent nos fringues, nos iPhones et tous ces gadgets qu'on nous vend un fric dingue alors qu'on paye des ouvriers-esclaves une misère pour les réaliser dans des conditions sanitaires exécrables.

    - Bien sûr que non ! C'est évident ! Toi comme moi savons bien qu'on échangerait jamais nos jobs pour un de ceux-là. Mais, posons le problème autrement : Demain, personne n'est plus contraint par la nécessité à exercer une activité qu'il n'a pas choisie, un boulot de merde pour parler clairement. Et entre nous, il y a aussi beaucoup de boulots à la con en haut de la pyramide et avec des salaires confortables à la clef. Combien d'ingénieurs ou de cadres sup', qui exploitent ou empoisonnent le monde, partent avec leur pécule pour cultiver du bio en Ardèche et regarder pousser leurs mômes ? Enfin, c'est encore un autre problème... Je reprends là où j'en étais : Demain, on ne trouve plus personne pour faire ces boulots. Que se passera-t-il ?

    1Utopies réalistes  - Rutger Bregman - ) On fera le tri rapidement entre les activités réellement nécessaires et utiles à  notre société et celles qui ne le sont pas.

    2) On sera dans l'obligation de rendre attractives les activités nécessaires à nos besoins fondamentaux. Peut-être tout simplement en faisant enfin coïncider le montant des salaires avec les véritables valeurs ? Nettoyer les rues, ramasser les poubelles, nourrir le monde sainement, éduquer la jeunesse, soigner et assurer la protection et la garantie des libertés de chacun (et non plus seulement des biens), ... la liste est longue. Tous ces métiers devront être rétribués à la hauteur du service rendu à la collectivité. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Si demain, il est plus rémunérateur de recycler les déchets, d'enseigner ou de soigner que de courir après un ballon ou de fermer une entreprise pour augmenter le profit de ses actionnaires, les volontaires se bousculeront au portillon. Et non pas seulement pour le salaire, mais aussi parce que tous ces métiers dépréciés et méprisés aujourd'hui seront porteurs de valeurs et de reconnaissance...

    - ça y est, Liza, tu recommences avec les Bisounours. Tu crois réellement que nos politiques, culs et chemises avec les sbires de la finance, véritables dirigeants et décideurs de ce monde, laisseront faire cela ?

    - Bien sûr que non, ils ne nous laisseront pas faire ! Cela fait des années que nos politiques ont enterré le Bien Commun sans fleur ni couronne et qu'ils nous engluent petit à petit dans un système qui nous contraint à l'acceptation, tu sais le TINA de Thatcher ! There is no alternative ! Ce bouquin, comme tu dis, il nous en donne des alternatives et des pistes pour y arriver. Rutger Bregman nous prouve qu'une autre réalité peut être possible. Il suffit peut-être seulement de la vouloir et de s'organiser pour la faire advenir ?

    Si nous voulons changer le monde, il nous faut être irréalistes, déraisonnables et impossibles. Rappeler-vous : ceux qui appelaient à l'abolition de l'esclavage, au droit de vote des femmes et au mariage pour tous, eux aussi étaient traités de fous. Jusqu'à ce que l'histoire leur donne raison.

    - A qui l'histoire donnera-t-elle raison, Liza ?

    - Commence par lire ce livre et on en reparle juste après...

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    4ième de couv :

    Ouvrir grand les frontières, une semaine de travail de quinze heures, le revenu de base universel... Des idées naïves et dépassées ou bien la force de l'utopie renouvelée ? Résolument anti-décliniste, Utopies réalistes tombe à pic et nous explique comment construire un monde idéal aujourd'hui et ne pas désespérer ! D'une ville canadienne qui a totalement éradiqué la pauvreté à l'histoire d'un revenu de base pour des millions d'Américains sous Richard Nixon, Rutger Bregman nous emmène dans un voyage à travers l'histoire, et, au-delà des divisions traditionnelles gauche-droite, il défend des idées qui s'imposent par la force même de l'exemple et le sérieux de la démarche historique. Tout progrès de la civilisation – des débuts de la démocratie à la fin de l'esclavage – fut d'abord considéré comme un fantasme de doux rêveurs.

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