• Si je pouvais croire, dit Rhoda, que la poursuite et le changement me feront devenir vieille, je serais débarrassée de ma peur : rien ne dure. L'instant ne mène pas à l'instant suivant. La porte s'ouvre et le tigre bondit. (...) J'ai peur du choc de la sensation qui bondit sur moi parce que je ne peux pas la traiter comme vous le faîtes je ne peux pas fondre l'instant dans l'instant qui suit. Pour moi, ils sont tous violents, tous distincts ; et si l'instant qui bondit me renverse sous le choc, vous vous jetterez sur moi, vous me mettrez en pièces. Je n'ai pas de but en vue. Je ne sais pas relier les minutes aux minutes et les heures aux heures, les dissoudre par une force naturelle pour composer la masse pleine et indivisible que vous appelez la vie. Les vagues - Virginia Woolf -
    Parce que vous, vous avez un but en vue – une personne, peut-être, vous asseoir à ses côtés, une idée, peut-être, votre
    beauté, peut-être ? Je ne sais pas – vos heures et vos jours défilent comme les branches des arbres et le vert soyeux des pistes forestières pour le chien courant qui suit la trace. Mais pour moi il n'y a pas de traces particulières, pas de corps particulier à suivre. Et je n'ai pas de visage. Je suis comme l'écume qui court sur la plage ou le clair de lune dont la flèche tombe ici sur une boîte de conserve, là sur la cuirasse métallique du chardon des dunes, ou sur un os ou sur une barque vermoulue. Je suis emportée par le vent dans les cavernes, et voltige comme une une feuille de papier dans des couloirs sans fin, et il faut que j'appuie la main contre le mur pour me retenir. 

     

    Peinture : Virginia Woolf, 40 x 50cm, Philippe Chateau, collection particulière

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  • Journal d'un écrivain - Virginia Woolf - Lundi 17 mars 1930
    La pierre de touche d'un livre, c'est cet espace qu'il a fallu prévoir, dans lequel vous pouvez introduire tout naturellement ce que vous avez à dire. Ainsi, ce matin, j'avais à même de dire ce que dit Rhoda. C'est la preuve que le livre a sa vie propre, car au lieu d'étouffer la chose que j'avais à dire, il m'a permis de la glisser en place sans la moindre compression ni la moindre altération.

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  • Depuis que j'avais rencontré Suzanne, ma vie avait pris un relief tranchant et mystérieux, qui dévoilait un monde au-delà du monde connu, le passage caché derrière la bibliothèque.

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  • Babylone - Yasmina Reza -On était jeunes. On ne savait pas que c'était irréversible. Aujourd'hui j'ai soixante-deux ans. Je ne pourrais pas dire que j'ai su être heureuse dans la vie, je ne pourrais pas me donner quatorze sur vingt à l'heure de ma mort, comme ce collègue de Pierre qui avait dit allez, disons quatorze sur vingt, moi je dirais plutôt douze, parce que moins j'aurai l'impression d'être ingrate ou de blesser, je dirais douze sur vingt en trichant. quand je serais sous terre qu'est-ce que ça changera ? Tout le monde se foutra que j'aie su ou non être heureuse dans la vie, et moi je m'en foutrai pas mal.

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  • Aujourd'hui, plus que jamais, les enfants ont besoin de retrouver l'espace, le temps, les outils et le silence nécessaires pour pouvoir développer leurs facultés à être curieux, créatifs, à réfléchir par eux-mêmes et à s'engager de façon constructive dans le monde. Malheureusement, lorsqu'une culture est guidées par la consommation et le matérialisme, elle n'accorde plus de valeur au jeu créatif. (..) les jouets qui se vendent le mieux sont présentés à coup de campagnes publicitaires qui vantent leur côté amusant. (...) Ils sont conçus pour être vendus. Alors s'ils finissent par lasser, tant mieux, une autre version sera bientôt sur le marché. 

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