• Marx et la poupée - Maryam Madjidi -

    Marx et la poupée - Maryam Madjidi -J'ai adoré ce livre ! Mélange de témoignages, de roman, de journal intime, empli de poésie... Il faut avoir vécu l'exil pour comprendre toute l'ambivalence des sentiments qui sont à l'oeuvre dans cette volonté "d'assimilation", de se sentir enfin à sa place dans un pays, une ville, un lieu, une communauté... Mais rien n'est plus difficile. Entre les souvenirs qui vous assaillent, la rancoeur parfois, de ne pas avoir une vie à la hauteur de ce que l'on s'était imaginée, la honte de ses racines et j'en passe.

    Maryam Madjidi arrive à 6 ans en France. Si jeune et pourtant. Les souvenirs de sa vie d'avant en Iran, sont bien présents et bien là ! On a ses yeux de petite fille et on assiste aux angoisses, aux tentatives désespérées des adultes pour lutter contre ce régime religieux qui les briment et les tuent jusqu'à la fuite de ce pays qu'ils ne reconnaissent plus...

    Une nuit, elle en est sûre, elle a vu sa mère dans le jardin, au pied de l'arbre, enterrer ses rêves, un par un, à côté de ses jouets à elle.

    Si ce n'est que Maryam, elle, ne voulait pas partir. Du haut de ses 6 ans, que comprendre à ce monde d'adultes ? Elle ne voit que ses jouets qui s'égrainent ailleurs, que les câlins de Maman Massoumeh qui ne la berceront plus : 

    Je voudrais que tu nous prennes en otage dans cette maison pour toujours, que tu ne nous laisses plus repartir. Donne-nous encore des plats délicieux, du thé, de la chaleur, des friandises. Prends soin de ma première maison. Enveloppe-nous, fais taire les cris du monde, parle-nous encore.

    Il y a de belles réflexions sur la langue natale : celle du passé, du monde honnis qu'on rejette enfant, et sur cette reconquête des mots, une fois adulte, quand le temps a fait son travail de résilience, de mémoire retrouvée et enfin désirée...

    Tu t'acharnais à maintenir un lien entre ton pays et ta fille. Corde rongée par l'exil, ne tenant plus qu'à un fil. Et ce fil était la langue. Mais cette langue, je ne l'aimais plus car elle me faisait souffrir. (...) Tu réalisais peu à peu que ce nouveau pays transformerait ta fille, tu avais peur qu'elle devienne une étrangère ou plutôt de devenir un étranger pour elle, qu'elle n'ait plus rien en elle d'iranien.

    Un livre poignant, sans être larmoyant au contraire. C'est une ode au courage et à la résistance. L'exil n'est pas forcément un échec. C'est aussi une deuxième chance et l'opportunité de continuer la lutte, d'une manière ou d'une autre... La littérature en est une ! 

    ¤ ¤ ¤
    4ième de couv : 

    Depuis le ventre de sa mère, Maryam vit de front les premières heures de la révolution iranienne. Six ans plus tard, elle rejoint avec sa mère son père en exil à Paris.
    À travers les souvenirs de ses premières années, Maryam raconte l’abandon du pays, l’éloignement de sa famille, la perte de ses jouets – donnés aux enfants de Téhéran sous l’injonction de ses parents communistes -, l’effacement progressif du persan, qu’elle va tour à tour rejeter, puis adopter frénétiquement, au point de laisser enterrée de longues années sa langue natale.

    Dans ce récit qui peut être lu comme une fable autant que comme un journal, Maryam Madjidi raconte avec humour et tendresse les racines comme fardeau, rempart, moyen de socialisation, et même arme de séduction massive.

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