• Un bonheur si fragile, tome 1 - Michel David -

    "J'aimerais te donner un conseil avant de partir. Tu vas à l'école. Profites-en pour apprendre tout ce que tu peux. Fais pas comme moi, j'ai passé ma vie tout seul, à quêter sur les routes. C'est une vie de chien. Pour être heureux dans la vie, il faut vivre avec du monde qu'on aime et qui nous aime. Oublie jamais ça."

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  •  Le printemps des poètes arrive doucement et avec lui quelques brèches qu'il va falloir tenir, maintenir ouvertes et tendues jusqu'à l'extrême. L'éveil.
    Le thème cette année : "Le grand vingtième : d'Apollinaire à Bonnefoy, cent ans de poésie".
    "La poésie est morte" : J’ai entendu ça hier !

    J'ai souvenir d'une lecture des planches courbes. Yves Bonnefoy s'installe, parle si doucement de sa voix caverneuse pourtant, que le silence qui s'était déjà invité, semble le recouvrir, lui, sa parole et sa présence authentique. Puis, sans lien ni entrée en matière, il ouvre les planches, ouvre ce lieu de vie où il n'y a plus rien d'autre que chaque soi suspendu à ses mots à lui.
    Et ce grand vide juste après.
    La discussion ? C'était difficile. Le véritable dialogue avait déjà eu lieu.

     

    "La poésie est morte" : J’ai entendu ça hier !

     

    Pourquoi toujours regarder en arrière ? Dieu sait que j’aime cette poésie du XX ième, mais voilà : C'est aujourd'hui que je respire et non hier. C'est maintenant que mon coeur pulse et c'est ici que ses battements raisonnent. Le XXI ième siècle est déjà en marche. Depuis seize ans. Seize années déjà que certains n’ont pas vues passer.
    Que faut-il faire pour qu'ils avancent, ne restent pas coincer sur cet âge d'or, le leur ?

     

    "La poésie est morte" : J’ai entendu ça hier !

     

     Que faut-il faire pour qu’on offre un espace de paroles aux poètes d'aujourd'hui ? Et n'est-ce pas trop facile d'invoquer ces "ils" et ces "on" ? Est-ce que cet espace s’offre ou se conquiert ? La poésie n'a que faire des institutions et la poésie institutionnalisée se répand dans les latrines de l'Histoire pour son plus grand désespoir.
    Alors ne pas courir après subventions, reconnaissance et édition. Écrire parce qu’on a quelque chose à dire. Même si personne n’est là pour l’entendre ?
    Tous ces poètes ignorés aujourd'hui qui ne savent ni crier ni se taire...

     

    "La poésie est morte" : J’ai entendu ça hier !

     

    Peut-être est-ce nos sociétés, nos vies qui vont trop vite ou sommes-nous à ce point gavés d'images, de bruits et de paroles, que nous n'avons pas su maintenir cet espace, cette sphère entrouverte pour le recueil et le recueillement ?

     

    "La poésie est morte" : J’ai entendu ça hier !

     

    Tu me dis cela comme ça. Pas de provocation dans ta voix et tes  yeux : tu constates. Et tu voudrais que je te réponde. Que je t'explique, que je riposte ou que je nie, j'é-crie ? J'aurais beau contester, consternée, toi et moi nous y changerons quoi ?

    "La poésie est morte" : Tu m'as dit !Peut être ouvrir les recueils, laisser les yeux courir entre les pages.

    Peut être fermer les recueils, courir les pistes de slam, assaillir l'oiseau de twitter de "jets de cailloux"1, et surtout : dire, écouter, lire, donner une voix haute et franche, à tous ces mots qui se battent à la marge.

    Laisser entrer les rimes et les libres dans nos oreilles et nos gorges pour se les approprier et les faire se tenir debout, face à nous !

    "La poésie est morte" : J’ai entendu ça hier !De bric et de broc, aller cahin caha au creux de l'épicentre d'une création sans annonceurs ni projecteurs. Éblouis par l'éclat de pépites et perles noyées à laver, polir et cajoler, au détour d’un chemin dont on ne sait pas encore si c’est le bon. Se fourvoyer dans un sentier et faire demi-tour, les pieds dans la rivière Serpentine, s’essouffler mais continuer à parier sur la poésie naissante, sur la/le poète balbutiant, sur cette lumière qui n'éclaire que celui qui sait la recevoir.

    Et puis..."La poésie est morte" : Tu m'as dit !

    Et puis s'accrocher à tous ces lanceurs de mots, comme autant de lanceurs d'alertes dans notre monde en dérive.

     

    "La poésie est morte" : J’ai entendu ça hier !

     

    - Quand tu auras tout dit, que te restera-t-il ?
    - Il me restera encore tes mots et les miens mêlés... sous la peau. 

     ¤ ¤ ¤


    1 - Si vous voulez connaître la suite donnée à ces jets de cailloux et découvrir son auteur - Ryôichi Wagô-, c’est ici et  !

    Photos : -Yves Bonnefoy - Chloé M. - Grand Corps Malade - Astrid Shriqui Garain -

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  • « Me retrouvant seul à la maison le 16 mars,  je me suis mis à écrire des tweets. Jusqu’alors,  je ne concevais la poésie que sur du papier. La force des mots ne venait pas si  je n’écrivais pas à la main. Mais après le séisme, le tsunami et l’explosion de la centrale,  j’ai pensé « C’en est fini de nous », tout ce que je considérais comme «absolu» s’est écroulé ».

     

    17 mars, 22 h 47
    C’est une nuit calme. Une nuit
 vraiment très calme. L’haleine
 de la radioactivité.

     

    17 mars, 23 h 32
    D’abord le grondement de la terre.
 Et puis, ça secoue. Quelque chose s’ébat un instant. Tu vois, ce calme est rempli de vacarme. Écoute, la réplique arrive.

     

    Les jets de cailloux, Entretien avecRyôichi Wagô - revue Kotoba, 2011 -
    Hajime Ishikawa/ Flickr

    « Fukushima a été complètement dévastée, ravagée par une tempête de cauchemar, elle est aujourd’hui encore [août 2011] recouverte d’un épais nuage. Je voudrais que Shi no kaikô [« Retrouvailles en poèmes »] soit la lumière, mais ça ne sera pas une lumière radieuse qui descend du ciel. Compte tenu de la situation actuelle, une telle lumière n’est pas possible. Mais je voudrais au moins qu’une trouée dans le nuage laisse passer un rai de lumière. »

    ¤ ¤ ¤

    Ryôichi Wagô, écrivain japonais originaire de Fukushima a vécu le tremblement de terre qui a entraîné la catastrophe du Tsunami et de la centrale nucléaire. Devant un tel anéantissement, il a twitté tous les jours, parfois heure par heure, des poèmes : seule manière possible pour lui de s’exprimer. Ses poèmes, ses « jets de cailloux », comme il les a appelés, il les a lancés sur la toile, comme on jetterai une bouteille à la mer. Les réfugiés ont fait circuler ses textes sur twitter, les ont recopiés sur des bouts de papiers pour les lire, faire lire. Et aussi faire dire. Car eux ne le pouvaient plus.
    Des jets de cailloux à la face du monde.

    Si vous voulez connaître la suite donnée à ces jets de cailloux et découvrir cet auteur, c’est ici !

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  •  

    Ils vous annoncent un polar, mais ne vous y fiez pas ! C'est bien plus que cela. Laissez tomber la 4ième de couv. Vous en saurez un peu plus, mais bon, rien qui pourra vous préparer à cette bombe littéraire, ce scud venu tout droit de l'ancienne terre soviétique qui va vous envoyez illico presto aux portes de l'enfer, cerné(e) par les marécages de Nazino.
    Nazino, cette « île des cannibales » où furent déportées 6 000 personnes, sans nourriture, sans abri, sans rien excepté ce qu'ils avaient sur le dos et dans leurs poches. Ces « éléments socialement nuisibles » sensés coloniser les terres arides pour la gloire de la patrie socialiste vont finir par s'entredévorer, abandonnés à leur sort.
    Voilà qui plante le décor, mais ne vous donne que le tempo, tant le rythme du récit est dense et soutenu.

     


    Tout s'est joué là-bas, dans les années 30. Et tout ce qui secoue la Barcelone du XXIième siècle dans cette histoire, a ses racines dans cette terre aride.
    Gonzalo Gil ne sait pas vers quoi il s'embarque, quand il décide de poursuivre l'enquête, ou plutôt la quête de sa soeur, agente de police que l'on soupçonne d'un meurtre sanguinaire commis pour venger l'assassinat de son fils et qui s'est suicidée juste avant que la justice ne la rattrape. Cet homme sans histoire (dans tous les sens du terme) va ouvrir les portes de la backroom de l'Histoire, là où se forgent les lignes directrices des grands évènements de nos civilisations : dans la fange et le sang.


    Jamais entendu parler de Nazino avant de lire ce livre. Je me suis documentée et me demande pourquoi est-ce que l'on ne nous apprend pas cela à l'école ? Qu'est-ce qui justifie ce silence gêné ou cette évocation à mi-mots avant de tourner vite la page sur les crimes staliniens ? Staline, Franco, Hitler : même combat !
    Enfin la question on se la pose par principe, car on en connaît tous plus ou moins la réponse. Vous savez :L'histoire...
    C'est elle qui va façonner les hommes et les femmes de ce récit, les broyer, les ré-éduquer ou les porter aux nues. Et c'est elle qui trônera encore et toujours, la tête haute, contre vents et marées : « L'esclave le plus fidèle est celui qui se sent libre. »



    Victor de Arbol est un virtuose des mots et de la narration (à saluer : la traduction de Claude Bleton) ; il vous embarque de Barcelone à Nazino, des années 30 au début des années 2000 avec une allégresse et une dextérité qui ne peuvent que soulever l'admiration et rendent le lecteur fébrile, suspendu à ses mots et ces pages que l'on enrage de quitter quand il nous faut abandonner le livre pour retourner pagayer dans le courant de nos vies.

    La dernière page refermée, on se retrouve comme Elias Gil, ce personnage dantesque qui n'aura de cesse de sauver sa peau :
    « Il était plein de trous, telle une vieille carcasse de bateau, et il lui arrivait de penser qu'il ne pourrait plus flotter, plus jamais. »


    ¤ ¤ ¤


    Les bois flottés finissent toujours par s'échouer sur la côte, rejetés par l'océan. Et les mains des hommes les façonnent à leur guise...

     

    ¤ ¤ ¤

    Toutes les vagues de l'océan - Victor del Arbol -

    4ième de couv

     

    Gonzalo Gil reçoit un message qui bouleverse son existence : sa sœur, de qui il est sans nouvelles depuis de nombreuses années, a mis fin à ses jours dans des circonstances tragiques. Et la police la soupçonne d’avoir auparavant assassiné un mafieux russe pour venger la mort de son jeune fils. Ce qui ne semble alors qu’ un sombre règlement de comptes ouvre une voie tortueuse sur les secrets de l’histoire familiale et de la figure mythique du père, nimbée de non-dits et de silences.
    Cet homme idéaliste, parti servir la révolution dans la Russie stalinienne, a connu dans l’enfer de Nazino l’incarnation du mal absolu, avec l’implacable Igor, et de l’amour fou avec l’incandescente Irina. La violence des sentiments qui se font jour dans cette maudite “île aux cannibales” marque à jamais le destin des trois protagonistes et celui de leurs descendants. Révolution communiste, guerre civile espagnole, Seconde Guerre mondiale, c’est toujours du côté de la résistance, de la probité, de l’abnégation que ce parangon de vertu, mort à la fleur de l’âge, a traversé le siècle dernier. Sur fond de pression immobilière et de mafia russe, l’enquête qui s’ouvre aujourd’hui à Barcelone rebat les cartes du passé. La chance tant attendue, pour Gonzalo, d’ébranler la statue du commandeur, de connaître l’homme pour pouvoir enfin aimer le père.
    Toutes les vagues de l’océan déferlent dans cette admirable fresque d’un xxe siècle dantesque porteur de toutes les utopies et de toutes les abjections humaines.

     

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    Interview Victor del Arbol - Librairie Mollat - :

     

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  • "L’opérateur referma la trappe et remit une pierre ovale à Gonzalo. C’était une matière indestructible sur laquelle était gravé un numéro d’identification, pour éviter d’éventuelles confusions. Quand on lui remettrait les cendres, ce numéro garantirait qu’elles appartenaient à Laura. Dans dix mille ans, quand il n’y aura plus ni cendres ni restes, les hommes de l’avenir se demanderont où sont passés les ossements de leurs ancêtres. Et dans les fouilles ils trouveront des milliers, des millions de pierres comme celle-ci."

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